Kevin Denard La corde sensible

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L’histoire de Kevin Denard, c’est une légende écrite par un barde qui aurait oublié, au préalable, de réviser sa géographie. La preuve par la musique, extrêmement atypique, qu’il a fait sienne : un mélange de blues américain et de mélodies indiennes, deux genres apparemment incompatibles mais dont l’alliage est en réalité extraordinairement puissant, original et planant…

A 11 000 kilomètres près

Le blues, Kevin Denard a ça dans le sang depuis qu’il est tout petit. Son père étant lui-même harmoniciste de blues, sa voie était toute tracée : il suivrait les pas du pater, version guitare. Sa découverte de la musique indienne, en revanche, est le fruit d’un hasard incroyable. On aurait bien vu Kevin partir en pèlerinage au pays des râgas, ce ne fut pas le cas : car c’est en réalité sur une île canadienne que la rencontre se fit. « Il y a quelques années, j’ai demeuré pendant quelques mois sur une toute petite île qui s’appelle Salt Spring Island [ndlr : côte pacifique du Canada] et c’est là que j’ai rencontré un chaman de l’inde qui y habitait. Il m’a fait découvrir le râga music de l’Inde, que je ne connaissais absolument pas. Ça a été un coup de foudre absolu » nous raconte le jeune musicien. Ce chaman, par ailleurs, lui offre un instrument extrêmement rare (il n’en existerait que 10 exemplaires dans le monde) : le Mohan Veena, un mélange entre une guitare et un sitar. Kevin Denard s’y colle en autodidacte. Et commence à fabriquer cette étrange musique qui le caractérise, installée à cheval sur deux continents…

Décollage

De là à avoir l’idée de se produire en concert, il lui faut encore un peu de temps… « Au début, mélanger la musique blues et la musique indienne, j’ai fait ça sans arrière-pensée, j’ai fait ça pour moi-même, pour m’éclater, et puis petit à petit j’ai commencé à construire un répertoire. Un jour, on m’a dit : pourquoi tu ne présentes pas ça, fais un concert ! Alors, comme tout jeune musicien, je suis allé frapper à la porte du Celtic (rires)… Et ça a marché ! J’ai évolué ensuite, je me suis mis à jouer du banjo, je me suis mis à chanter, à faire de l’harmonica, et puis voilà maintenant j’en suis arrivé à faire un album. » Et s’il n’y avait qu’un album ! Il y a aussi un certain nombre de concerts par an, dont récemment une tournée dans la grande banlieue parisienne (dans le cadre de Blues sur Seine), et, un peu moins récemment, une belle tournée d’un mois et demi au Québec (15 dates).. Bref, la carrière de Kevin Denard décolle, on pourrait le dire à moins, et le jeune musicien multiplie les projets, notamment de nouveaux albums, qu’il pourrait monter, entre autres, avec des artistes canadiens. D’ici à ce que ceux-ci ne se préfigurent, vous pouvez (surtout) découvrir le récent nouvel album de Kevin Denard, Reuben’s Train, dans lequel il est assurément à son meilleur…

De quelques obstacles non infranchissables

Il y a quelque chose qu’on hésitait à vous dire à propos de Kevin Denard, tout simplement parce que ça n’ajoute ni ne retranche rien à son talent. Mais il s’avère, en en ayant discuté avec lui, que la chose a probablement beaucoup joué dans sa décision, tout jeune, de s’adonner à la musique. Alors, voilà, on le lâche : Kevin Denard est sourd. A l’âge de deux ans, il a été victime d’otites à répétition, qui lui auront finalement retiré 80 % de ses capacités d’audition. Depuis, il a été appareillé, mais sa première langue, à Kevin, ce n’est pas le blues… c’est le langage des signes. C’est la seconde partie de sa légende, celle qui veut qu’un petit garçon sourd peut s’élever, à force de travail (et, dans le cas de Kevin Denard, d’énormément de travail, le jeune musicien étant un véritable acharné), au meilleur niveau. On insiste, au meilleur ! D’ici à quelques années, Kevin Denard devrait devenir un musicien plus que reconnu, en France ou au Canada, si ses pas le mènent plutôt de ce coté-là de l’Atlantique. On sera alors fier, au Mag, de lui avoir consacré un article avant qu’il ne soit devenu la star qu’il sera bientôt. Et vous, lecteurs, vous pourrez être fiers à votre tour de l’avoir soutenu à ses débuts… Aussi, et si vous avez le blues dans le sang, courrez acheter son dernier album, Reuben’s Train ! Il se pourrait bien que d’ici peu il devienne complètement collector.

Pour suivre Kevin Denard, et pour tout savoir de ses dates prochaines de concert : page Facebook Kevin Denard Official

Texte : Joseph C.Lacour